Publié dans le journal La Presse le 22 mai 2008.
Lavoie, Frédérick
Collaboration spéciale
Tbilissi avait des envies contre-révolutionnaires hier soir. Quelque 7000 partisans de l'opposition géorgienne ont manifesté jusqu'à tard dans la nuit pour dénoncer des législatives "truquées".
Selon les sondages à la sortie des urnes, le Mouvement national du président Mikheïl Saakachvili remporterait 63% des voix et conserverait facilement la majorité des 150 sièges du Parlement.
L'Opposition unie, qui rassemble neuf partis, pour la plupart d'anciens alliés déçus du héros de la révolution des roses de 2003, ne récolterait qu'un maigre 14%.
Mais la coalition avait des chiffres totalement différents. Elle prévoyait ainsi sa victoire dans la capitale avec 40,5% contre 32% pour le Mouvement national.
Vers 1h30, les leaders de l'opposition ont finalement appelé les manifestants à revenir ce soir et les jours suivants pour poursuivre la contestation, lorsque les résultats officiels seraient dévoilés.
"En janvier, Levan [Gatchetchiladze] avait remporté dans les faits la présidentielle [contre Saakachvili], mais il avait arrêté le peuple", dit Chota Gludjidze, un proche ami de celui qui était tête de liste de l'Opposition unie pour le scrutin d'hier. "Mais les gens en ont ras le bol."
Entre deux discours enflammés, les organisateurs diffusaient sur écran géant des vidéos montrant des batailles dans les bureaux de scrutin ou encore des membres présumés du parti au pouvoir forcer des paysans à voter pour leur formation.
Un militant de l'opposition a même été assassiné hier dans l'ouest du pays, mais les autorités ont indiqué que sa mort n'était pas liée au scrutin.
Durant la journée, La Presse a été témoin d'irrégularités dans des bureaux de vote de Tbilissi.
Au bureau 65, c'était le branle-bas de combat vers 11 h du matin. En demi-cercle, des observateurs de l'opposition accusaient à mots à peine voilés le président de la commission électorale du district de Samgori de vouloir falsifier le scrutin.
"Il y a des gens vivants qui ne sont pas sur la liste électorale et d'autres, déménagés ou morts, qui y sont!" tonnait Natela Soulaberidze, observatrice pour le Parti républicain. Le président de la commission a expliqué que ces irrégularités étaient dues à des "problèmes techniques".
Au bureau 97, Galiko Zoubadze, candidate de l'opposition, avait convoqué les médias en matinée, arguant qu'elle avait disparu de la liste électorale.
Le responsable de la commission estimait que la politicienne voulait simplement "discréditer" l'élection, puisqu'elle pouvait légalement voter dans le bureau voisin, où elle était inscrite.
Mme Zoubadze a en effet pu sans problème voter au bureau 96, quelques centaines de mètres plus loin.
Les législatives d'hier représentaient un test pour le président Saakachvili, de plus en plus contesté depuis novembre dernier, alors que des manifestations de l'opposition avaient été violemment réprimées.
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