Article publié (deuxième de deux) dans le journal La Presse, le 7 mai 2008
Lavoie, Frédérick
Collaboration spéciale
KAZAN, Tatarstan - Vladimir Poutine quitte le Kremlin au sommet de sa popularité. En huit années de pouvoir, il a instauré un système autoritaire où tout poste important se mérite en échange d'une loyauté indéfectible.
Prenez Rinat Zakirov. Président du Congrès mondial tatar, organisme censé défendre les droits du deuxième peuple en importance dans le pays, après les Russes. Il ne s'offusque pas du fait que le gouvernement russe, sous Poutine, ait voté une loi pour interdire le retour à l'alphabet latin de la langue tatare. "L'important pour nous, ce n'est pas ça", assure M. Zakirov. Il a compris qu'il valait mieux avoir le Kremlin de son côté pour espérer faire avancer ses intérêts. Il est d'ailleurs lui-même devenu chef d'une formation municipale liée à Russie unie, parti dirigé depuis un mois par Poutine lui-même.
À la chute de l'URSS, le Tatarstan nationaliste avait déclaré sa souveraineté, avant de signer une entente avec la fédération, lui conférant une large autonomie. Aujourd'hui, le président tatar est toujours le même. Mais depuis 2004, il n'est plus élu. Il est nommé directement par le Kremlin, comme tous les chefs des exécutifs régionaux. En huit ans de régime Poutine, l'autonomie tatare a fondu comme neige au soleil.
La politologue Maria Lipman ne s'étonne pas de ce genre de réaction, où même des gens aux intérêts divergents du Kremlin lui jurent fidélité. "[Poutine] en est arrivé à contrôler à 100% la vie politique du pays."
Le bilan du président sortant n'est toutefois pas pour autant négatif, à son avis. Au contraire. "N'importe quel président dans n'importe quel pays, à la fin de ses deux mandats, serait fier des réalisations de Poutine, qui sont importantes." Elle souligne surtout "l'amélioration significative de la situation économique du pays", rappelant que Poutine a hérité d'un pays au bord de la faillite le 31 décembre 1999, jour de la démission-surprise de Boris Eltsine.
Certes, le président du deuxième pays exportateur d'or noir au monde a profité du quintuplement du prix du baril de pétrole depuis huit ans. "Poutine a été extrêmement chanceux. Mais pour les citoyens russes, l'important c'est qu'ils ressentent que leur vie s'est améliorée et pour ça ils lui sont reconnaissants."
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