Article publié dans La Croix, le 3 avril 2009.
Alors que la Moldavie élit dimanche son nouveau Parlement où les communistes devraient conserver la majorité après huit ans de pouvoir, les Européens se sentent écartés des négociations sur le statut de la Transnistrie. Dans cette région séparatiste, de facto indépendante depuis 1991, Moscou marque des points.
Un diplomate européen en poste à Chisinau parle de «grande défaite diplomatique». Avant de partir pour Moscou le 18 mars pour rencontrer son homologue russe Dmitri Medvedev et le leader transnistrien Igor Smirnov, le président moldave Vladimir Voronine avait assuré les Occidentaux qu'il n'y signerait aucun document. « À son retour, il s'est présenté devant nous la tête baissée », note le diplomate.
Le président moldave venait de parapher une déclaration commune dans laquelle les leaders réaffirmaient leur foi en la formule de négociation 5 + 2 (Russie, Ukraine, OSCE, États-Unis et UE, plus Moldavie et Transnistrie), inactive depuis février 2006.
Dans les faits, la Russie se posait ainsi en seul interlocuteur valable pour régler le statut de cette bande de terre deux fois grande comme le Luxembourg, située sur la rive orientale du Dniestr. Selon le politologue Vladislav Koulminski, le président moldave n'a pas fait de grande concession stratégique à Moscou, si ce n'est d'accepter la présence militaire russe en Transnistrie jusqu'au règlement final de son statut. « Le problème, c'est surtout que cela a été fait dans le dos de l'Europe. »
Malgré cette petite trahison, les Occidentaux ne peuvent se permettre de critiquer trop vertement les communistes de Vladimir Voronine, qui devraient remporter leur troisième élection consécutive dimanche. « L'Europe ne veut pas les pousser davantage vers la Russie », souligne Vladislav Koulminski. Le président Voronine, à la fois pro-européen et prorusse, a d'ailleurs su naviguer durant ses huit années de pouvoir entre ces deux pôles d'attraction, souvent à des fins électoralistes.
Les Occidentaux ont été beaucoup moins actifs que les Russes dans le dossier et sont donc en partie responsables de leur mise de côté, estime pour sa part le journaliste transnistrien d'opposition Andreï Safonov. « Les États-Unis et l'Union européenne n'ont jamais vraiment proposé de plan concret pour résoudre le conflit. »
Officieusement, le régime transnistrien n'exclut pas une forme d'union lâche avec la Moldavie, même si l'indépendance suivie d'un rattachement - peu probable - à la Russie demeure officiellement l'option privilégiée. Mais puisque le régime de Tiraspol est soutenu financièrement et politiquement par les Russes, les clés du règlement se trouvent à Moscou, selon le vice-ministre moldave à la réintégration, Ion Stavila.
« La Russie utilise la Transnistrie pour contrôler l'ensemble de la vie politique moldave », ajoute Vladislav Koulminski. Le statu quo étant tolérable pour Moscou et Tiraspol, le conflit ne pourra être réglé que si le Kremlin est certain de pouvoir maintenir une emprise sur la Moldavie entière. Après les Baltes, la Géorgie et l'Ukraine, pas question pour Moscou de laisser une autre ex-république soviétique sortir de sa sphère d'influence.
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