Enregistrée et écrite sur les terres argileuses, instables, mais vraies de Sologne (France), le 1er avril 2007...
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C’est tellement plus facile de quitter le bonheur que le malheur. Le bonheur, on peut le laisser là, avec son sourire, sa soif de vivre à revendre. Et partir, l’âme en paix.
S’il est assez grand, s’il est assez fort et surtout, s’il a assez confiance, il va continuer sa route. Il va foncer à vive allure, avec une petite parcelle de nous ancrée solidement en soi et qui va l’aider à ne pas avoir peur. Il va vivre, et nous aussi. Parce qu’on ne se fera pas de mauvais sang pour lui.
Mais partir, un désordre de coeur en tête, un inaccomplissement sur la conscience; partir avec l’idée qu’on n’a pas tout fait pour sauver les meubles de la maison qui nous brûle sous les yeux, nous brûle les yeux; partir sur une césure dans le parcours des mots qui nous reflètent l’état d’âme, même si continuer, même si rajouter des lettres quand il y en a déjà trop ne servirait à rien; partir devient un abandon de navire. Par le matelot ou le capitaine, peu importe. Un abandon de navire par quelqu’un qui se dit qu’il aurait pu encore faire quelque chose parce qu’il y avait sûrement quelque chose à faire d’impossible pour éviter l’abîme.
Alors on retarde. On retarde le départ, par devoir, par orgueil peut-être, par honneur c’est possible, par amour, j’espère par amour, parce qu’on se dit que c’est la seule chose qui peut nous pousser à se faire aussi mal en espérant en ressortir ne serait-ce qu’une once de bonheur, même si ça ne se pèse pas le bonheur, même si dans le fond, on en voudrait toujours plus.
Et vient le jour où l’on doit partir, parce qu’il le faut; parce qu’il a fallu qu’il y ait une limite à tout ça; parce que la non-vie ne pouvait plus continuer jusqu’à notre mort. La limite, c’est un précipice. Un précipice qu’on déboule mètre par mètre, pierre par pierre, jusqu’à atteindre le fond, la terre ferme.
Puis ensuite, on doit remonter. Parce qu’il le faut, c’est tout.
On hésite. On remonte à petits pas en se réapprivoisant les sens qui ont repris leurs esprits, un peu, de plus en plus, plus ou moins.
On remonte, tranquillement, parfois en se disant qu’on devrait peut-être revenir sur nos pas et on prie pour ne pas s’écouter l’inconscience qui cogne pour nous sortir de notre courage d’aller à contre-courant pour notre bien.
Et après…après…après tout, après rien, après le déluge, moi.
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