Texte publié dans La Presse et La Tribune de Genève le 9 février 2010.
(Moscou) Viktor Ianoukovitch a pris sa revanche. Celui qui avait été humilié par la Révolution orange prodémocratique en 2004 après une victoire frauduleuse deviendra finalement président de l'Ukraine, à l'issue du scrutin serré de dimanche dernier. La tâche devant lui est colossale. Le pays est empêtré dans des querelles politiques et la crise économique l'a dévasté. Voici cinq travaux qui attendent le nouveau président des 45 millions d'Ukrainiens.
1. Devenir président
La première tâche du nouveau président sera... de devenir président, croit le politologue ukrainien Volodymyr Fessenko. La première ministre Ioulia Timochenko, battue par un peu plus de 3%, n'a toujours pas concédé la victoire et crie à la «fraude électorale». Selon M. Fessenko, elle voudrait ainsi forcer le gagnant à chercher un compromis avec elle, espérant conserver son poste de première ministre.
Pour réellement prendre le pouvoir, Ianoukovitch devra réussir à former une nouvelle coalition parlementaire en cooptant des ex-révolutionnaires oranges, alliés de Timochenko et du président sortant Viktor Iouchtchenko, qui disposent actuellement de la majorité à la Rada (Parlement ukrainien).
2. Renouer avec Moscou
En politique extérieure, Ianoukovitch devra relancer les relations avec Moscou, très tendues sous le président sortant pro-occidental Viktor Iouchtchenko. «Il ne sera pas pour autant prorusse», nuance M. Fessenko, directeur du Centre d'études politiques Penta, à propos de celui qui était perçu comme le «candidat du Kremlin» en 2004.
Preuve d'une intention de se rapprocher de Moscou avec modération: avant l'élection, le camp Ianoukovitch n'a pas voulu prendre de position claire sur la reconnaissance des régions séparatistes géorgiennes d'Ossétie-du-Sud et d'Abkhazie, une question chère au régime russe.
3. Rassurer l'Europe
Depuis la révolution Orange, Ianoukovitch n'a pas bonne presse en Occident. Le russophone de 59 ans a de la difficulté à se défaire son image d'antioccidental et à faire oublier ses trois ans d'incarcération pour vol, coups et blessures durant sa jeunesse. L'ouverture à l'Europe durant les cinq années postrévolutionnaires a toutefois diversifié les intérêts du pays et de ses propres alliés, rendant essentiel le maintien d'une bonne relation avec le Vieux Continent.
4. Remettre l'économie sur pied
Ravagée par la crise économique, l'Ukraine compte sur le financement occidental pour se remettre à flot, elle qui a vu son PIB reculer de près de 15% l'an dernier. En raison de l'instabilité politique, le Fonds monétaire international a gelé ses prêts l'automne dernier. Ianoukovitch devra convaincre l'organisation de la fiabilité de son pays.
5. Signer la paix gazière
Pour espérer stabiliser son pays, Viktor Ianoukovitch devra régler pour de bon la question du gaz, à l'origine de plusieurs conflits avec la Russie et de la perte de confiance de l'Europe envers l'Ukraine.
En janvier 2009, accusant Kiev de retard de paiement et de vol de gaz, Moscou avait fermé les robinets pour l'énième fois. Plus de 80% du gaz russe destiné à l'UE transitant par le territoire ukrainien, une bonne partie de l'Europe s'était retrouvée sans chauffage en plein coeur d'une vague de froid.
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