Article paru dans le journal La Presse le 29 avril 2010.
(Moscou) Ils sont journalistes, opposants libéraux ou d'extrême droite, satiristes, et ont deux choses en commun: ils critiquent tous le pouvoir russe et sont tous tombés dans le piège et dans le lit de la même femme. Alors que les vidéos de leurs ébats sont diffusées sur l'internet, les «victimes» de «Katia» accusent le Kremlin.
Lorsque Katia Guerassimova lui a proposé de la cocaïne, le jeune opposant Ilia Iachine a compris que quelque chose ne tournait pas rond. Il a alors quitté le luxueux appartement du mannequin pour ne plus y revenir. C'était il y a un an et demi.
Il y a un mois, les choses se sont éclaircies. Dans une première vidéo diffusée sur l'internet, qui montre le rédacteur en chef de la livraison russe de Newsweek Mikhaïl Fichman à demi nu en train de consommer une poudre blanche, Ilia Iachine a tout de suite reconnu le «mauvais appartement». Et il n'est pas le seul.
Le satiriste Vitkor Chenderovitch, leader du Parti national-bolchévique et écrivain Édouard Limonov et le chef du Mouvement contre l'immigration illégal, Alexander Potkine, ont tous reconnu avoir été piégés par la belle et pulpeuse brunette aux longues jambes, introuvable depuis.
La semaine dernière, une vidéo mise en ligne les montre nus en pleine action avec une jeune fille au visage et au corps assombris au montage.
Comme les vidéos précédentes, elle a été mise en ligne sur Kanal911.com. Ce site créé à la fin du mois de mars se présente comme le portail du «Comité public pour la défense de la morale, de la loi et de l'entente civile».
Aucune vidéo des ébats sexuels de Iachine avec Katia et une copine n'a été diffusé sur la Toile. Rien non plus sur un autre leader de l'opposition, Roman Dobrokhotov, qui affirme aussi avoir été piégé. Les deux jeunes célibataires, qui ont refusé d'utiliser les stupéfiants proposés, n'ont en effet rien à se reprocher.
Une autre vidéo circule, toutefois, montrant Ilia Iachine en train de donner un pot-de-vin à un policier de la circulation, faux ou complice, qui le menaçait de lui retirer son permis de conduire pour une infraction au code de la route. Un analyste politique a aussi été piégé de la sorte.
Méthode soviétique
À l'époque soviétique, ce genre de vidéo était utilisé pour faire chanter des diplomates étrangers et les contraindre à rendre des informations stratégiques à l'URSS.
L'été dernier, deux diplomates, américain et britannique, ont été filmés chacun leur tour dans des circonstances similaires, soi-disant en compagnie de prostituées. Le gouvernement américain a alors dénoncé une «campagne de salissage» digne de la guerre froide.
Aucune des victimes de Katia n'a affirmé avoir fait l'objet de chantage. Selon eux, il est toutefois clair que le pouvoir se cache derrière cette série de scandales.
Au cours des derniers jours, la plupart des victimes ont réagi sur leur blogue. Et mardi, Ilia Iachine a porté plainte contre ceux qui auraient produit et mis en ligne les vidéos compromettantes, demandant au procureur de «vérifier la participation à ce crime» de Vladislav Sourkov et Vasili Iakemenko. Le premier est l'un des principaux idéologues du Kremlin. Le deuxième est le fondateur et ex-leader du mouvement jeunesse pro-Kremlin Nachi, devenu haut fonctionnaire.
Nachi a répliqué en demandant à la justice d'arrêter et de juger les protagonistes filmés en train de consommer de la drogue ou d'offrir des pots-de-vin.
Sur son blogue, le satiriste Viktor Chenderovitch, père cinquantenaire marié, a essayé de tourner le scandale à la blague, se plaignant de n'avoir eu droit qu'à une seule fille, contre deux pour les plus jeunes opposants comme Iachine.
Il rappelle aussi que depuis 10 ans, le régime de Vladimir Poutine n'a jamais répondu aux accusations de corruption, de meurtres et d'usurpation du pouvoir qu'il a formulées. «L'administration poutinienne a écouté tout cela avec un grand sang-froid, sans jamais rien nier, et elle répond par ses habituelles saletés illégales», écrit-il.
À l'attention du pouvoir, Chenderovitch ajoute que maintenant que «l'opposition est décrédibilisée pour de bon, on peut s'occuper d'attraper Dokou Oumarov», leader de la rébellion islamiste dans le Caucase. «J'ai un conseil pour vous: envoyez-lui Katia.»
jeudi 29 avril 2010
Jets d'oeuf et gaz fumigènes au Parlement ukrainien
Article publié dans La Presse le 27 avril 2010
(Moscou) Lancers de fumigènes et d'oeufs, combats à mains nues entre députés: le parlement ukrainien s'est transformé en vrai champ de bataille, hier, lors de la ratification d'un important accord stratégique avec la Russie. Selon l'opposition ukrainienne tout juste chassée du pouvoir, l'entente qui prolonge de 25 ans la présence de la marine russe sur son territoire menace la souveraineté du pays.
Habitué de la météo parlementaire ukrainienne souvent orageuse, le président de la Rada, Volodymyr Litvine, avait prévu le coup hier. Il s'est présenté au travail accompagné de deux gardes du corps tenant de grands parapluies noirs.
Même lorsqu'un oeuf lancé par un député de l'opposition pro-occidentale a percé la défense des parapluies et l'a atteint, Litvine est resté impassible.
Entre deux toussotements causés par l'épaisse fumée qui envahissait le parlement, il a fait voter les députés sur l'entente conclue une semaine plus tôt par le nouveau président ukrainien, Viktor Ianoukovitch, et son homologue russe, Dmitri Medvedev. Au final, le texte a été adopté par une courte majorité de 236 députés sur 450.
Flotte contre gaz à rabais
À l'extérieur du parlement, les partisans des deux camps, séparés par une ceinture policière, ont manifesté vigoureusement pour et contre la ratification de l'entente.
L'accord prévoit le maintien jusqu'en 2042 de la flotte russe de la mer Noire, stationnée dans la presqu'île de Crimée. En échange, l'Ukraine bénéficiera d'un rabais de 30% sur le gaz naturel russe, ressource essentielle pour le fonctionnement de son industrie lourde énergivore.
À Moscou, 30 minutes après les échauffourées à Kiev, la Douma (Chambre basse) a ratifié le même accord à l'unanimité, hormis l'abstention des ultranationalistes, opposés au rabais sur le gaz.
Durant les cinq ans du mandat de l'ex-président ukrainien pro-occidental et nationaliste Viktor Iouchtchenko, la question du gaz a été une source de tension constante entre Kiev et Moscou.
En janvier 2009, faute de paiement, la Russie a fermé les robinets gaziers durant près de trois semaines à l'Ukraine. Une bonne partie de l'Europe a aussi été privée de gaz en pleine vague de froid, 80% du gaz russe qui y est destiné transitant par le territoire ukrainien.
Le président Iouchtchenko, battu au premier tour de la présidentielle en janvier, avait auparavant bien fait comprendre à la Russie qu'il n'entendait pas renouveler le bail de la flotte russe après l'échéance de 2017 et qu'elle ferait mieux de commencer à plier bagage.
Poutine intervient
L'arrivée au pouvoir de Viktor Ianoukovitch, plutôt pro-russe, a changé la donne. S'il a réservé sa première visite officielle à Bruxelles pour rassurer l'Occident, il a néanmoins entrepris de renouer les liens avec l'allié historique russe.
L'opposition ukrainienne n'a toutefois pas dit son dernier mot. L'ex-première ministre et candidate défaite à la dernière présidentielle Ioulia Timochenko a appelé ses partisans à manifester de nouveau le 11 mai.
Son but: «Bloquer le travail du Parlement et obtenir des élections anticipées» qu'elle espère remporter pour annuler le traité.
Le premier ministre russe, Vladimir Poutine, a de son côté qualifié de «hooligans» les députés de l'opposition ukrainiens, se réjouissant que les heurts n'aient pas empêché la ratification du traité. Il a aussi rappelé que lorsque Timochenko était à la tête du gouvernement, la politicienne populiste n'avait jamais clairement pris position contre la présence militaire russe en Crimée.
Selon un récent sondage d'un institut ukrainien, 65% de la population du pays est opposée au maintien de la base navale russe en Crimée.
(Moscou) Lancers de fumigènes et d'oeufs, combats à mains nues entre députés: le parlement ukrainien s'est transformé en vrai champ de bataille, hier, lors de la ratification d'un important accord stratégique avec la Russie. Selon l'opposition ukrainienne tout juste chassée du pouvoir, l'entente qui prolonge de 25 ans la présence de la marine russe sur son territoire menace la souveraineté du pays.
Habitué de la météo parlementaire ukrainienne souvent orageuse, le président de la Rada, Volodymyr Litvine, avait prévu le coup hier. Il s'est présenté au travail accompagné de deux gardes du corps tenant de grands parapluies noirs.
Même lorsqu'un oeuf lancé par un député de l'opposition pro-occidentale a percé la défense des parapluies et l'a atteint, Litvine est resté impassible.
Entre deux toussotements causés par l'épaisse fumée qui envahissait le parlement, il a fait voter les députés sur l'entente conclue une semaine plus tôt par le nouveau président ukrainien, Viktor Ianoukovitch, et son homologue russe, Dmitri Medvedev. Au final, le texte a été adopté par une courte majorité de 236 députés sur 450.
Flotte contre gaz à rabais
À l'extérieur du parlement, les partisans des deux camps, séparés par une ceinture policière, ont manifesté vigoureusement pour et contre la ratification de l'entente.
L'accord prévoit le maintien jusqu'en 2042 de la flotte russe de la mer Noire, stationnée dans la presqu'île de Crimée. En échange, l'Ukraine bénéficiera d'un rabais de 30% sur le gaz naturel russe, ressource essentielle pour le fonctionnement de son industrie lourde énergivore.
À Moscou, 30 minutes après les échauffourées à Kiev, la Douma (Chambre basse) a ratifié le même accord à l'unanimité, hormis l'abstention des ultranationalistes, opposés au rabais sur le gaz.
Durant les cinq ans du mandat de l'ex-président ukrainien pro-occidental et nationaliste Viktor Iouchtchenko, la question du gaz a été une source de tension constante entre Kiev et Moscou.
En janvier 2009, faute de paiement, la Russie a fermé les robinets gaziers durant près de trois semaines à l'Ukraine. Une bonne partie de l'Europe a aussi été privée de gaz en pleine vague de froid, 80% du gaz russe qui y est destiné transitant par le territoire ukrainien.
Le président Iouchtchenko, battu au premier tour de la présidentielle en janvier, avait auparavant bien fait comprendre à la Russie qu'il n'entendait pas renouveler le bail de la flotte russe après l'échéance de 2017 et qu'elle ferait mieux de commencer à plier bagage.
Poutine intervient
L'arrivée au pouvoir de Viktor Ianoukovitch, plutôt pro-russe, a changé la donne. S'il a réservé sa première visite officielle à Bruxelles pour rassurer l'Occident, il a néanmoins entrepris de renouer les liens avec l'allié historique russe.
L'opposition ukrainienne n'a toutefois pas dit son dernier mot. L'ex-première ministre et candidate défaite à la dernière présidentielle Ioulia Timochenko a appelé ses partisans à manifester de nouveau le 11 mai.
Son but: «Bloquer le travail du Parlement et obtenir des élections anticipées» qu'elle espère remporter pour annuler le traité.
Le premier ministre russe, Vladimir Poutine, a de son côté qualifié de «hooligans» les députés de l'opposition ukrainiens, se réjouissant que les heurts n'aient pas empêché la ratification du traité. Il a aussi rappelé que lorsque Timochenko était à la tête du gouvernement, la politicienne populiste n'avait jamais clairement pris position contre la présence militaire russe en Crimée.
Selon un récent sondage d'un institut ukrainien, 65% de la population du pays est opposée au maintien de la base navale russe en Crimée.
jeudi 22 avril 2010
Tourisme en Terre sainte... et occupée
Article publié dans la section Vacances/Voyage du journal La Presse le 10 avril 2010
C'est une terre qui a vu naître et errer le Christ. C'est aussi un haut lieu du conflit le plus médiatisé de la planète depuis plus de six décennies. Pourtant, le voyageur étranger peut se balader en Cisjordanie sans trop de problèmes. En pèlerin ou en touriste géopolitique.
Bien guidé en autocar climatisé vers les sites bibliques, on peut même presque oublier que la Cisjordanie est un territoire occupé. Palestiniens et Israéliens semblent du moins essayer de le faire oublier aux fidèles.
À Bethléem, présumé lieu de naissance de Jésus, la basilique de la Nativité accueille des milliers de visiteurs par jour. Autour, les commerçants palestiniens chrétiens proposent des crèches et le divin enfant sculpté dans du bois d'olivier. Le centre-ville est propre, soigné. Les affaires passent avant la politique.
La politique, elle, se trouve quelques kilomètres plus loin, dans les camps de réfugiés qui s'accrochent à la ville. Dans ces camps, devenus au fil des décennies des quartiers bétonnés avec presque toutes les commodités courantes grâce à l'aide internationale, des enfants tout sourire jouent à l'ombre du mur de séparation. En construction depuis 2002, les Palestiniens l'appellent le mur de l'"apartheid" ou de "la honte".
Comme à Berlin durant la guerre froide, le béton a inspiré les graffiteurs locaux et étrangers, qui lui ont donné des couleurs. Un restaurateur de Bethléem a même inscrit son menu sur la section du mur située en face de son établissement!
Le mur est ainsi devenu - littéralement - un incontournable de la vie cisjordanienne. En traversant à pied l'un des postes d'entrée vers l'État hébreu, le touriste peut expérimenter ce que subissent quotidiennement les rares Palestiniens qui disposent encore d'un permis de travail pour Israël.
Derrière des vitres, des soldats israéliens vous somment d'avancer, de passer des contrôles similaires à ceux d'un aéroport et de présenter vos documents. Un passeport canadien assure un passage rapide, alors que certains Palestiniens sont refoulés.
Nous nous sommes déplacés en Cisjordanie grâce à l'efficace système de minicars et taxis collectifs. Sur la route, les colonies israéliennes perchées dans les montagnes sont difficiles à différencier des villages palestiniens.
Faire contre mauvaise fortune bon coeur
À Hébron, toutefois, le conflit saute aux yeux. C'est qu'ici, les colonies israéliennes sont non seulement en périphérie de la ville palestinienne... mais aussi en plein centre-ville.
Quelque 500 juifs fondamentalistes y sont installés depuis 1967, tout près du tombeau des Patriarches, site religieux mi-mosquée, mi-synagogue. La poignée de colons est protégée par environ 4000 soldats israéliens.
Les Palestiniens locaux ont décidé de faire contre mauvaise fortune bon coeur. Plusieurs guides improvisés proposent de faire monter les étrangers sur les toits pour exposer l'occupation qu'ils vivent au quotidien.
Dans les petites rues marchandes de la vieille ville délabrée, les touristes se font rares. Au-dessus de l'une d'elles, les commerçants ont installé un grillage pour se protéger des déchets lancés par les colons qui habitent au-dessus.
À Ramallah, la capitale officieuse du non-État palestinien, les habitants locaux ne se retournent même plus au passage d'étrangers. Les travailleurs humanitaires et les diplomates y sont légion. Dans d'autres villes moins touristiques comme Naplouse, enfants et commerçants décochent des hello chaleureux ou gênés à la vue de touristes.
Alors, dangereuse, la Cisjordanie? En fait, la criminalité de rue y est moins élevée qu'en Israël. En une semaine passée dans cinq villes différentes, nous n'avons jamais ressenti la moindre agressivité à notre égard.
Pour ce qui est des troubles politiques, ils se prédisent à peu près comme la météo. Une annonce de construction de nouvelles colonies par le gouvernement israélien se traduit par une forte probabilité d'averse de pierres à certains endroits stratégiques. Les habitués sauront vous indiquer les lieux à éviter pour la journée, alors que la vie dans les territoires occupés suivra son cours.
Et si vous préférez tout de même ne pas vous aventurer seuls, différentes ONG engagées organisent des tours de "tourisme solidaire" d'une journée, généralement en partance de Jérusalem. Les guides vous dresseront un historique (pro-palestinien) du conflit et sauront vous faire remarquer certains détails de l'occupation qui peuvent échapper à l'oeil non aiguisé.
C'est une terre qui a vu naître et errer le Christ. C'est aussi un haut lieu du conflit le plus médiatisé de la planète depuis plus de six décennies. Pourtant, le voyageur étranger peut se balader en Cisjordanie sans trop de problèmes. En pèlerin ou en touriste géopolitique.
Bien guidé en autocar climatisé vers les sites bibliques, on peut même presque oublier que la Cisjordanie est un territoire occupé. Palestiniens et Israéliens semblent du moins essayer de le faire oublier aux fidèles.
À Bethléem, présumé lieu de naissance de Jésus, la basilique de la Nativité accueille des milliers de visiteurs par jour. Autour, les commerçants palestiniens chrétiens proposent des crèches et le divin enfant sculpté dans du bois d'olivier. Le centre-ville est propre, soigné. Les affaires passent avant la politique.
La politique, elle, se trouve quelques kilomètres plus loin, dans les camps de réfugiés qui s'accrochent à la ville. Dans ces camps, devenus au fil des décennies des quartiers bétonnés avec presque toutes les commodités courantes grâce à l'aide internationale, des enfants tout sourire jouent à l'ombre du mur de séparation. En construction depuis 2002, les Palestiniens l'appellent le mur de l'"apartheid" ou de "la honte".
Comme à Berlin durant la guerre froide, le béton a inspiré les graffiteurs locaux et étrangers, qui lui ont donné des couleurs. Un restaurateur de Bethléem a même inscrit son menu sur la section du mur située en face de son établissement!
Le mur est ainsi devenu - littéralement - un incontournable de la vie cisjordanienne. En traversant à pied l'un des postes d'entrée vers l'État hébreu, le touriste peut expérimenter ce que subissent quotidiennement les rares Palestiniens qui disposent encore d'un permis de travail pour Israël.
Derrière des vitres, des soldats israéliens vous somment d'avancer, de passer des contrôles similaires à ceux d'un aéroport et de présenter vos documents. Un passeport canadien assure un passage rapide, alors que certains Palestiniens sont refoulés.
Nous nous sommes déplacés en Cisjordanie grâce à l'efficace système de minicars et taxis collectifs. Sur la route, les colonies israéliennes perchées dans les montagnes sont difficiles à différencier des villages palestiniens.
Faire contre mauvaise fortune bon coeur
À Hébron, toutefois, le conflit saute aux yeux. C'est qu'ici, les colonies israéliennes sont non seulement en périphérie de la ville palestinienne... mais aussi en plein centre-ville.
Quelque 500 juifs fondamentalistes y sont installés depuis 1967, tout près du tombeau des Patriarches, site religieux mi-mosquée, mi-synagogue. La poignée de colons est protégée par environ 4000 soldats israéliens.
Les Palestiniens locaux ont décidé de faire contre mauvaise fortune bon coeur. Plusieurs guides improvisés proposent de faire monter les étrangers sur les toits pour exposer l'occupation qu'ils vivent au quotidien.
Dans les petites rues marchandes de la vieille ville délabrée, les touristes se font rares. Au-dessus de l'une d'elles, les commerçants ont installé un grillage pour se protéger des déchets lancés par les colons qui habitent au-dessus.
À Ramallah, la capitale officieuse du non-État palestinien, les habitants locaux ne se retournent même plus au passage d'étrangers. Les travailleurs humanitaires et les diplomates y sont légion. Dans d'autres villes moins touristiques comme Naplouse, enfants et commerçants décochent des hello chaleureux ou gênés à la vue de touristes.
Alors, dangereuse, la Cisjordanie? En fait, la criminalité de rue y est moins élevée qu'en Israël. En une semaine passée dans cinq villes différentes, nous n'avons jamais ressenti la moindre agressivité à notre égard.
Pour ce qui est des troubles politiques, ils se prédisent à peu près comme la météo. Une annonce de construction de nouvelles colonies par le gouvernement israélien se traduit par une forte probabilité d'averse de pierres à certains endroits stratégiques. Les habitués sauront vous indiquer les lieux à éviter pour la journée, alors que la vie dans les territoires occupés suivra son cours.
Et si vous préférez tout de même ne pas vous aventurer seuls, différentes ONG engagées organisent des tours de "tourisme solidaire" d'une journée, généralement en partance de Jérusalem. Les guides vous dresseront un historique (pro-palestinien) du conflit et sauront vous faire remarquer certains détails de l'occupation qui peuvent échapper à l'oeil non aiguisé.
Attentat de Moscou: L'une des kamikazes avait 17 ans
Article publié dans les journaux La Presse et 20 minutes.
Moscou - À 16 ans, Djennet Abdourakhmanova a rencontré son mari sur l'internet. Un an plus tard, lundi dernier, elle s'est fait exploser dans le métro de Moscou pour venger la mort de ce dernier, tuant ainsi une vingtaine de civils.
Si elle n'était pas originaire du Caucase du Nord, le sort de Djennet Abdourakhmanova pourrait surprendre. Après tout, comme toutes les petites filles, il y a quelques années encore, elle lisait des poèmes en l'honneur de sa mère à l'école.
Mais la violence qui enflamme sa république natale du Daguestan a fini par la rattraper. À 17 ans, son nom s'est ajouté à la longue liste des "veuves noires", ces femmes de combattants rebelles du Caucase qui ont choisi l'attentat suicide pour venger la mort de leur mari.
Depuis 1999, des dizaines de femmes, principalement tchétchènes, sont devenues kamikazes en Russie. Elles se sont fait exploser dans le métro moscovite, dans des avions, à des concerts rock, près de commissariats de police. En 2002, elles étaient 19, ceinturées d'explosifs, à participer à la prise d'otages dans le théâtre de la Doubrovka à Moscou qui a fait 130 morts parmi les spectateurs.
Pour Djennet Abdourak-hmanova, tout est allé très vite. Selon le quotidien Kommersant, après qu'il l'eut rencontrée sur l'internet, Oumalat Magomedov l'aurait forcée à devenir sa femme. Sur des photos transmises hier par la police, on voit le couple enlacé, l'air complice, manier des pistolets et des grenades.
C'était avant qu'Oumalat Magomedov, surnommé l'Émir du Daguestan, meure le 31 décembre dernier, lors d'un échange de tirs avec la police à Khassaviourt, dans l'ouest du Daguestan.
Ensuite, toujours selon Kommersant, Djennet aurait été convaincue de se sacrifier par des "idéologues wahhabites" liés aux combattants rebelles.
Hier après-midi, le Comité antiterroriste de Russie a confirmé que Djennet Abdourakhmanova était bien la kamikaze du métro Loubianka, où se trouve le siège des services de sécurité russe (FSB).
Deuxième non identifiée
L'identité de la deuxième kamikaze n'a toutefois pas encore été révélée. Les enquêteurs ont nié qu'il s'agissait de la femme d'un leader rebelle tchétchène tué récemment, comme l'ont laissé entendre les médias russes hier.
Interrogé par le Moscow Times, un étudiant en médecine malaisien blessé légèrement lors du deuxième attentat à la station Park Koultoury a raconté que la femme non identifiée était vêtue d'un ample manteau violet et "ne portait pas de voile. Ses yeux étaient grands ouverts, comme si elle était droguée, et ils clignaient à peine. C'était effrayant", relate Sim Eih Xing, 23 ans, qui a quitté le wagon juste avant l'explosion.
Sur les photos avec son mari, Djennet Abdourakhmanova porte une tenue noire et un voile qui ne laisse paraître que son visage. Les kamikazes auraient donc laissé tomber la stricte tenue islamique avant de commettre leurs attaques suicide, qui ont fait au total 40 morts et plus de 80 blessés.
Hier, les autorités ont diffusé la capture d'écran d'une vidéo de surveillance du métro montrant un homme au long nez, portant un béret, soupçonné d'avoir aidé les kamikazes. Deux autres présumées complices, des femmes slaves, sont aussi recherchées.
Alors que plusieurs députés exigent le retour de la peine de mort pour les terroristes, abolie il y a quelques mois, le président Dmitri Medvedev a rejeté cette option. Le juriste de formation a plutôt réitéré son souhait de voir les responsables des attentats éliminés, appelant implicitement à leur assassinat extrajudiciaire.
Moscou - À 16 ans, Djennet Abdourakhmanova a rencontré son mari sur l'internet. Un an plus tard, lundi dernier, elle s'est fait exploser dans le métro de Moscou pour venger la mort de ce dernier, tuant ainsi une vingtaine de civils.
Si elle n'était pas originaire du Caucase du Nord, le sort de Djennet Abdourakhmanova pourrait surprendre. Après tout, comme toutes les petites filles, il y a quelques années encore, elle lisait des poèmes en l'honneur de sa mère à l'école.
Mais la violence qui enflamme sa république natale du Daguestan a fini par la rattraper. À 17 ans, son nom s'est ajouté à la longue liste des "veuves noires", ces femmes de combattants rebelles du Caucase qui ont choisi l'attentat suicide pour venger la mort de leur mari.
Depuis 1999, des dizaines de femmes, principalement tchétchènes, sont devenues kamikazes en Russie. Elles se sont fait exploser dans le métro moscovite, dans des avions, à des concerts rock, près de commissariats de police. En 2002, elles étaient 19, ceinturées d'explosifs, à participer à la prise d'otages dans le théâtre de la Doubrovka à Moscou qui a fait 130 morts parmi les spectateurs.
Pour Djennet Abdourak-hmanova, tout est allé très vite. Selon le quotidien Kommersant, après qu'il l'eut rencontrée sur l'internet, Oumalat Magomedov l'aurait forcée à devenir sa femme. Sur des photos transmises hier par la police, on voit le couple enlacé, l'air complice, manier des pistolets et des grenades.
C'était avant qu'Oumalat Magomedov, surnommé l'Émir du Daguestan, meure le 31 décembre dernier, lors d'un échange de tirs avec la police à Khassaviourt, dans l'ouest du Daguestan.
Ensuite, toujours selon Kommersant, Djennet aurait été convaincue de se sacrifier par des "idéologues wahhabites" liés aux combattants rebelles.
Hier après-midi, le Comité antiterroriste de Russie a confirmé que Djennet Abdourakhmanova était bien la kamikaze du métro Loubianka, où se trouve le siège des services de sécurité russe (FSB).
Deuxième non identifiée
L'identité de la deuxième kamikaze n'a toutefois pas encore été révélée. Les enquêteurs ont nié qu'il s'agissait de la femme d'un leader rebelle tchétchène tué récemment, comme l'ont laissé entendre les médias russes hier.
Interrogé par le Moscow Times, un étudiant en médecine malaisien blessé légèrement lors du deuxième attentat à la station Park Koultoury a raconté que la femme non identifiée était vêtue d'un ample manteau violet et "ne portait pas de voile. Ses yeux étaient grands ouverts, comme si elle était droguée, et ils clignaient à peine. C'était effrayant", relate Sim Eih Xing, 23 ans, qui a quitté le wagon juste avant l'explosion.
Sur les photos avec son mari, Djennet Abdourakhmanova porte une tenue noire et un voile qui ne laisse paraître que son visage. Les kamikazes auraient donc laissé tomber la stricte tenue islamique avant de commettre leurs attaques suicide, qui ont fait au total 40 morts et plus de 80 blessés.
Hier, les autorités ont diffusé la capture d'écran d'une vidéo de surveillance du métro montrant un homme au long nez, portant un béret, soupçonné d'avoir aidé les kamikazes. Deux autres présumées complices, des femmes slaves, sont aussi recherchées.
Alors que plusieurs députés exigent le retour de la peine de mort pour les terroristes, abolie il y a quelques mois, le président Dmitri Medvedev a rejeté cette option. Le juriste de formation a plutôt réitéré son souhait de voir les responsables des attentats éliminés, appelant implicitement à leur assassinat extrajudiciaire.
Les islamistes récidivent en Russie
Article publié dans les journaux La Presse et 20 minutes le 1er avril 2010.
Moscou - Les islamistes du Caucase récidivent en Russie. Deux jours après la double attaque qui a fauché la vie de 38 civils dans le métro de Moscou, deux kamikazes se sont fait exploser hier devant le commissariat de Kizliar, petite ville de l'instable république du Daguestan, tuant 12 personnes.
Cette fois, les "martyrs" étaient des hommes. Et les victimes, principalement des policiers.
Peu avant 9h, deux agents de la circulation ont sommé le conducteur d'une voiture de s'immobiliser parce qu'il venait d'enfreindre le code de la route. Devant son refus d'obtempérer, ils se sont lancés à sa poursuite, et le conducteur a fait sauter les explosifs qu'il transportait - l'équivalent de 200 kg de TNT. Les agents sont morts, de même qu'une passante et le kamikaze lui-même.
Vingt minutes plus tard, alors qu'enquêteurs et ambulanciers s'affairaient sur les lieux, un deuxième kamikaze déguisé en policier s'est fait exploser. Neuf personnes sont mortes, dont le chef de la police locale et l'enquêteur principal.
Après plus de cinq ans sans attaque terroriste à Moscou, le double attentat commis lundi par deux femmes avait secoué le pays entier, frappé en plein coeur.
La routine...
Celui d'hier au Daguestan était presque routinier pour la pauvre république de 2,5 millions d'habitants. Le dernier attentat suicide remontait au 6 janvier. Il visait aussi un poste de police.
Entre les opérations antiterroristes menées par les forces fédérales et les attaques des islamistes, rares sont les jours calmes au Daguestan.
Dans les dernières années, des dizaines de policiers et de politiciens locaux y sont morts sous les balles ou les bombes des rebelles islamistes.
En juin 2009, par exemple, le ministre de l'Intérieur de la République a été abattu à l'arme automatique. Il avait déjà survécu à trois tentatives d'assassinat.
Avec la Tchétchénie et l'Ingouchie voisine, le Daguestan est le centre de la rébellion islamiste. Héritiers du mouvement indépendantiste tchétchène, les combattants radicalisés prônent désormais l'instauration d'un émirat dans tout le Caucase russe.
Hier, Dmitri Medvedev a rapidement lié les attentats du Daguestan à ceux de Moscou. "Tout cela, ce sont des maillons de la même chaîne", a déclaré le président russe, qui a appelé au renforcement des mesures de sécurité partout dans le pays et à l'élimination des responsables des attaques.
***
L'attentat de Moscou revendiqué
Des rebelles islamistes ont revendiqué hier l'attentat de lundi dans le métro de Moscou. Dans une vidéo mise en ligne sur YouTube, l'"émir du Caucase" autoproclamé Dokou Oumarov a indiqué que les deux femmes qui ont ensanglanté la capitale russe avaient agi sous son "ordre personnel".
Il a aussi exhorté les Russes à cesser de soutenir le gouvernement du premier ministre Vladimir Poutine, responsable selon lui de la mort d'innocents dans le Caucase. "Ce n'est pas la dernière opération", a prévenu en russe le Tchétchène de 45 ans, assis dans une forêt, vêtu d'un treillis militaire. "Je vous promets que la guerre arrivera dans vos rues, inch'Allah (si Dieu le veut), et vous la ressentirez dans vos propres vies."
En revanche, quelques heures plus tôt, un porte-parole des rebelles réfugié à Istanbul avait démenti dans une entrevue téléphonique avec l'agence Reuters que les rebelles de "l'Émirat du Caucase" soient responsables de l'attentat.
Moscou - Les islamistes du Caucase récidivent en Russie. Deux jours après la double attaque qui a fauché la vie de 38 civils dans le métro de Moscou, deux kamikazes se sont fait exploser hier devant le commissariat de Kizliar, petite ville de l'instable république du Daguestan, tuant 12 personnes.
Cette fois, les "martyrs" étaient des hommes. Et les victimes, principalement des policiers.
Peu avant 9h, deux agents de la circulation ont sommé le conducteur d'une voiture de s'immobiliser parce qu'il venait d'enfreindre le code de la route. Devant son refus d'obtempérer, ils se sont lancés à sa poursuite, et le conducteur a fait sauter les explosifs qu'il transportait - l'équivalent de 200 kg de TNT. Les agents sont morts, de même qu'une passante et le kamikaze lui-même.
Vingt minutes plus tard, alors qu'enquêteurs et ambulanciers s'affairaient sur les lieux, un deuxième kamikaze déguisé en policier s'est fait exploser. Neuf personnes sont mortes, dont le chef de la police locale et l'enquêteur principal.
Après plus de cinq ans sans attaque terroriste à Moscou, le double attentat commis lundi par deux femmes avait secoué le pays entier, frappé en plein coeur.
La routine...
Celui d'hier au Daguestan était presque routinier pour la pauvre république de 2,5 millions d'habitants. Le dernier attentat suicide remontait au 6 janvier. Il visait aussi un poste de police.
Entre les opérations antiterroristes menées par les forces fédérales et les attaques des islamistes, rares sont les jours calmes au Daguestan.
Dans les dernières années, des dizaines de policiers et de politiciens locaux y sont morts sous les balles ou les bombes des rebelles islamistes.
En juin 2009, par exemple, le ministre de l'Intérieur de la République a été abattu à l'arme automatique. Il avait déjà survécu à trois tentatives d'assassinat.
Avec la Tchétchénie et l'Ingouchie voisine, le Daguestan est le centre de la rébellion islamiste. Héritiers du mouvement indépendantiste tchétchène, les combattants radicalisés prônent désormais l'instauration d'un émirat dans tout le Caucase russe.
Hier, Dmitri Medvedev a rapidement lié les attentats du Daguestan à ceux de Moscou. "Tout cela, ce sont des maillons de la même chaîne", a déclaré le président russe, qui a appelé au renforcement des mesures de sécurité partout dans le pays et à l'élimination des responsables des attaques.
***
L'attentat de Moscou revendiqué
Des rebelles islamistes ont revendiqué hier l'attentat de lundi dans le métro de Moscou. Dans une vidéo mise en ligne sur YouTube, l'"émir du Caucase" autoproclamé Dokou Oumarov a indiqué que les deux femmes qui ont ensanglanté la capitale russe avaient agi sous son "ordre personnel".
Il a aussi exhorté les Russes à cesser de soutenir le gouvernement du premier ministre Vladimir Poutine, responsable selon lui de la mort d'innocents dans le Caucase. "Ce n'est pas la dernière opération", a prévenu en russe le Tchétchène de 45 ans, assis dans une forêt, vêtu d'un treillis militaire. "Je vous promets que la guerre arrivera dans vos rues, inch'Allah (si Dieu le veut), et vous la ressentirez dans vos propres vies."
En revanche, quelques heures plus tôt, un porte-parole des rebelles réfugié à Istanbul avait démenti dans une entrevue téléphonique avec l'agence Reuters que les rebelles de "l'Émirat du Caucase" soient responsables de l'attentat.
Attentats de Moscou: la piste des islamistes du Caucase privilégiée
Article publié dans le journal La Presse le 30 mars 2010.
Moscou - Deux attentats suicide dans le métro de Moscou hier matin ont fait 38 morts et plus de 60 blessés. Selon les autorités russes, les auteures seraient deux femmes liées à la rébellion islamiste dans le Caucase du Nord.
Le moment et le lieu avaient été choisis pour faire le plus de victimes possible: 7h57 et 8h36, lundi matin, dans des stations de métro du centre de Moscou, sur la ligne la plus fréquentée.
À la fermeture des portes, aux stations Lioubianka et Park Koultoury, les deux kamikazes ont fait détoner leur ceinture d'explosifs, tuant et blessant plusieurs passagers du métro.
Même si le métro moscovite n'avait pas connu d'attentats depuis plus de cinq ans, le modus operandi avait des airs de déjà-vu dans la capitale russe.
Quelques minutes avant de se donner la mort à quatre stations de distance, les deux femmes s'étaient engouffrées ensemble dans les profondeurs du métro. Selon les caméras de surveillance, l'une était "une jeune femme de 18-20 ans, au visage typique du Caucase et aux yeux marron".
Une jeune femme du Caucase, un peu comme celle qui s'était fait exploser à l'entrée de la station Rijskaïa en août 2004, faisant 10 victimes. Ou celles qui avaient participé, ceinturées d'explosifs, à la prise d'otages dans un théâtre de Moscou en 2002 (130 morts).
Les veuves noires
À l'époque, elles avaient été surnommées les "veuves noires". Plusieurs avaient perdu un mari, un frère ou un père, abattus par les forces de l'ordre russes lors d'opérations antiterroristes ou de "nettoyage". L'identité et le passé des deux kamikazes d'hier n'ont toutefois pas encore été déterminés.
Les autorités russes n'ont mis que quelques heures pour lier les deux femmes aux rebelles du Caucase du Nord, qui appellent à la formation d'un État islamique indépendant dans cette région historiquement trouble.
Plusieurs officiels anonymes et experts russes ont estimé que ces attentats pourraient être un acte de vengeance des rebelles après l'intensification des opérations antiterroristes dans le Caucase au cours des derniers mois. En mars, les forces russes ont tué trois des principaux leaders de la guérilla.
Le premier ministre de la Russie, Vladimir Poutine, a promis hier que les "terroristes" qui ont organisé ces attentats seraient "éliminés".
Dans la même veine, le président Dmitri Medvedev a indiqué que la lutte contre les "terroristes" se poursuivrait "sans compromis et jusqu'au bout".
À double tranchant
Nikolaï Petrov, politologue au centre Carnegie de Moscou, croit toutefois que l'intensification des opérations contre les rebelles peut s'avérer une arme à double tranchant pour le Kremlin.
"Le pouvoir comprend qu'une escalade de la violence dans le Caucase n'est pas du tout dans son intérêt, particulièrement en prévision des Jeux olympiques de 2014", qui se dérouleront à Sotchi, à quelques centaines de kilomètres de la Tchétchénie et de l'Ingouchie.
Selon lui, le Kremlin doit surtout briser le "cercle vicieux" qui entraîne plusieurs jeunes du Caucase à prendre le maquis pour venger leurs proches, innocents ou vrais rebelles, tués par les forces russes.
Sur les ondes de la radio libérale Échos de Moscou, la chroniqueuse indépendante Ioulia Latynina, experte du Caucase, a dit hier que le meilleur moyen d'empêcher ce genre d'attentat est d'offrir une "autre perspective d'avenir" aux jeunes des républiques pauvres du Caucase.
***
Encadré: Contester le pouvoir dans le sang
De l'imam Chamil, qui combattit l'empire russe durant 30 ans au XIXe siècle, aux islamistes des dernières années, en passant par les indépendantistes tchétchènes de la décennie 90, le Caucase du Nord a toujours contesté le pouvoir russe. Le plus souvent dans le sang. Les attentats d'hier en sont le dernier épisode.
Entre la ville de Moscou et la région du Caucase, il y a un monde. La première est riche, instruite, relativement libérale. La deuxième dépend des subsides fédéraux, a un taux de chômage qui dépasse les 50% dans plusieurs localités et est fortement traditionaliste et religieuse.
Après une accalmie durant l'ère soviétique, les hostilités ont recommencé avec les velléités d'indépendance de l'élite politique tchétchène dès la chute de l'empire. Les Russes ont répondu par la bouche de leurs canons, craignant que la sécession tchétchène n'entraîne celle d'autres peuples.
Indépendance et religion
Militairement moins forts, des chefs de guerre tchétchènes se sont tournés vers le terrorisme. Au fil de la lutte, l'idée d'indépendance a pris une couleur religieuse. La mort du président indépendantiste tchétchène Aslan Maskhadov, tué par les forces russes en 2005, a signé la fin de la modération et des possibilités de dialogue entre les rebelles et Moscou.
Ses successeurs autoproclamés ont appelé à la guerre sainte pour former un émirat dans tout le Caucase du Nord. Ils ont exhorté leurs frères musulmans des républiques voisines d'Ingouchie et du Daguestan à s'unir à leur lutte. Depuis plusieurs années, autorités et experts estiment qu'il ne resterait guère plus que de 500 à 1000 rebelles cachés dans les forêts montagneuses de la région. Or, malgré les opérations antiterroristes incessantes des forces russes, qui éliminent régulièrement quelques dizaines d'insurgés, la rébellion tient bon et se régénère.
***
Principaux attentats terroristes en Russie au cours des dernières années
Août-septembre 1999
Cinq attentats dans des immeubles en banlieue de Moscou font 293 morts. Vladimir Poutine accuse les indépendantistes tchétchènes d'en être les auteurs et lance la deuxième guerre de Tchétchénie.
Octobre 2002
Un commando tchétchène prend en otages plus de 800 personnes au théâtre de la Doubrovka à Moscou. Après trois jours, les forces russes lancent l'assaut à l'aide d'un gaz toxique: 130 otages meurent, la plupart en raison du gaz.
Février 2004
Un attentat à la station Avtozavodskaïa, revendiqué par un groupe tchétchène, fait 41 morts.
Septembre 2004
Une prise d'otages par un commando pro-tchétchène se termine par un assaut des forces russes. Plus de 330 morts, dont une majorité d'enfants.
Novembre 2009
Une bombe posée sur les rails explose au passage du train Nevski Ekspress, reliant Moscou et Saint-Pétersbourg. L'attaque a fait 26 morts. Les autorités russes arrêtent des rebelles islamistes jugés responsables de l'attentat.
Moscou - Deux attentats suicide dans le métro de Moscou hier matin ont fait 38 morts et plus de 60 blessés. Selon les autorités russes, les auteures seraient deux femmes liées à la rébellion islamiste dans le Caucase du Nord.
Le moment et le lieu avaient été choisis pour faire le plus de victimes possible: 7h57 et 8h36, lundi matin, dans des stations de métro du centre de Moscou, sur la ligne la plus fréquentée.
À la fermeture des portes, aux stations Lioubianka et Park Koultoury, les deux kamikazes ont fait détoner leur ceinture d'explosifs, tuant et blessant plusieurs passagers du métro.
Même si le métro moscovite n'avait pas connu d'attentats depuis plus de cinq ans, le modus operandi avait des airs de déjà-vu dans la capitale russe.
Quelques minutes avant de se donner la mort à quatre stations de distance, les deux femmes s'étaient engouffrées ensemble dans les profondeurs du métro. Selon les caméras de surveillance, l'une était "une jeune femme de 18-20 ans, au visage typique du Caucase et aux yeux marron".
Une jeune femme du Caucase, un peu comme celle qui s'était fait exploser à l'entrée de la station Rijskaïa en août 2004, faisant 10 victimes. Ou celles qui avaient participé, ceinturées d'explosifs, à la prise d'otages dans un théâtre de Moscou en 2002 (130 morts).
Les veuves noires
À l'époque, elles avaient été surnommées les "veuves noires". Plusieurs avaient perdu un mari, un frère ou un père, abattus par les forces de l'ordre russes lors d'opérations antiterroristes ou de "nettoyage". L'identité et le passé des deux kamikazes d'hier n'ont toutefois pas encore été déterminés.
Les autorités russes n'ont mis que quelques heures pour lier les deux femmes aux rebelles du Caucase du Nord, qui appellent à la formation d'un État islamique indépendant dans cette région historiquement trouble.
Plusieurs officiels anonymes et experts russes ont estimé que ces attentats pourraient être un acte de vengeance des rebelles après l'intensification des opérations antiterroristes dans le Caucase au cours des derniers mois. En mars, les forces russes ont tué trois des principaux leaders de la guérilla.
Le premier ministre de la Russie, Vladimir Poutine, a promis hier que les "terroristes" qui ont organisé ces attentats seraient "éliminés".
Dans la même veine, le président Dmitri Medvedev a indiqué que la lutte contre les "terroristes" se poursuivrait "sans compromis et jusqu'au bout".
À double tranchant
Nikolaï Petrov, politologue au centre Carnegie de Moscou, croit toutefois que l'intensification des opérations contre les rebelles peut s'avérer une arme à double tranchant pour le Kremlin.
"Le pouvoir comprend qu'une escalade de la violence dans le Caucase n'est pas du tout dans son intérêt, particulièrement en prévision des Jeux olympiques de 2014", qui se dérouleront à Sotchi, à quelques centaines de kilomètres de la Tchétchénie et de l'Ingouchie.
Selon lui, le Kremlin doit surtout briser le "cercle vicieux" qui entraîne plusieurs jeunes du Caucase à prendre le maquis pour venger leurs proches, innocents ou vrais rebelles, tués par les forces russes.
Sur les ondes de la radio libérale Échos de Moscou, la chroniqueuse indépendante Ioulia Latynina, experte du Caucase, a dit hier que le meilleur moyen d'empêcher ce genre d'attentat est d'offrir une "autre perspective d'avenir" aux jeunes des républiques pauvres du Caucase.
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Encadré: Contester le pouvoir dans le sang
De l'imam Chamil, qui combattit l'empire russe durant 30 ans au XIXe siècle, aux islamistes des dernières années, en passant par les indépendantistes tchétchènes de la décennie 90, le Caucase du Nord a toujours contesté le pouvoir russe. Le plus souvent dans le sang. Les attentats d'hier en sont le dernier épisode.
Entre la ville de Moscou et la région du Caucase, il y a un monde. La première est riche, instruite, relativement libérale. La deuxième dépend des subsides fédéraux, a un taux de chômage qui dépasse les 50% dans plusieurs localités et est fortement traditionaliste et religieuse.
Après une accalmie durant l'ère soviétique, les hostilités ont recommencé avec les velléités d'indépendance de l'élite politique tchétchène dès la chute de l'empire. Les Russes ont répondu par la bouche de leurs canons, craignant que la sécession tchétchène n'entraîne celle d'autres peuples.
Indépendance et religion
Militairement moins forts, des chefs de guerre tchétchènes se sont tournés vers le terrorisme. Au fil de la lutte, l'idée d'indépendance a pris une couleur religieuse. La mort du président indépendantiste tchétchène Aslan Maskhadov, tué par les forces russes en 2005, a signé la fin de la modération et des possibilités de dialogue entre les rebelles et Moscou.
Ses successeurs autoproclamés ont appelé à la guerre sainte pour former un émirat dans tout le Caucase du Nord. Ils ont exhorté leurs frères musulmans des républiques voisines d'Ingouchie et du Daguestan à s'unir à leur lutte. Depuis plusieurs années, autorités et experts estiment qu'il ne resterait guère plus que de 500 à 1000 rebelles cachés dans les forêts montagneuses de la région. Or, malgré les opérations antiterroristes incessantes des forces russes, qui éliminent régulièrement quelques dizaines d'insurgés, la rébellion tient bon et se régénère.
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Principaux attentats terroristes en Russie au cours des dernières années
Août-septembre 1999
Cinq attentats dans des immeubles en banlieue de Moscou font 293 morts. Vladimir Poutine accuse les indépendantistes tchétchènes d'en être les auteurs et lance la deuxième guerre de Tchétchénie.
Octobre 2002
Un commando tchétchène prend en otages plus de 800 personnes au théâtre de la Doubrovka à Moscou. Après trois jours, les forces russes lancent l'assaut à l'aide d'un gaz toxique: 130 otages meurent, la plupart en raison du gaz.
Février 2004
Un attentat à la station Avtozavodskaïa, revendiqué par un groupe tchétchène, fait 41 morts.
Septembre 2004
Une prise d'otages par un commando pro-tchétchène se termine par un assaut des forces russes. Plus de 330 morts, dont une majorité d'enfants.
Novembre 2009
Une bombe posée sur les rails explose au passage du train Nevski Ekspress, reliant Moscou et Saint-Pétersbourg. L'attaque a fait 26 morts. Les autorités russes arrêtent des rebelles islamistes jugés responsables de l'attentat.
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